Abandon de poste et chômage

Abandon de poste et chômageQuel droit au chômage après l’abandon de poste ? Examen de différentes situations : après l’abandon de poste tant que le contrat de travail n’est pas rompu ; à partir de la rupture du contrat … Et si l’employeur ne tire pas les conséquences de l’abandon de poste. Conditions pour bénéficier de l’Allocation de Retour à l’Emploi : durée de travail à justifier pour le droit à l’allocation chômage et autres conditions. Modalités de l’indemnisation du chômage : différé, délai d’attente ou de carence.

Mis à jour le 3 mai 2023.

La loi du 21 décembre 2022 sur l’assurance chômage a profondément modifié les conséquences d’un abandon de poste par un salarié en CDI. En effet, l’abandon de poste CDI est désormais présumé être une démission. De ce fait, un ex-salarié en CDI ne peut plus recevoir les allocations de chômage du fait de la seule rupture de son contrat. Un décret a rendu applicable cette modification à compter du 19 avril 2023. Pour en savoir plus. Mais, comme nous allons le voir, il subsiste toutefois des possibilités pour obtenir des allocations de chômage.

Que se passe-t-il pour le chômage après l’abandon de poste ?

Différentes situations doivent être examinées :

  • Après l’abandon de poste, tant que le contrat de travail n’est pas rompu (que le salarié soit en CDI ou en CDD) ;
  • Pour les salariés en CDI : A partir du moment où l’employeur le considère comme démissionnaire après une mise en demeure infructueuse,
  • Ou pour les salariés en CDD : A partir de la rupture pour faute grave ;
  • Et si l’employeur ne tire pas les conséquences de l’abandon de poste, quelles sont les solutions ?

Chômage après l’abandon de poste, tant que le contrat de travail n’est pas rompu

Après l’abandon de poste, tant que le contrat de travail n’est pas rompu, le salarié ne pourra en aucun cas obtenir une allocation de chômage au titre des droits constitués dans l’emploi abandonné. Les allocations de chômage sont, en effet, réservées aux personnes ayant perdu leur emploi. Or, le salarié en abandon de poste n’a pas perdu son emploi, puisque son contrat de travail n’est pas rompu.

L’inconvénient pour le salarié, c’est que cette situation peut durer un certain temps, voir s’éterniser.

A partir du moment où l’employeur considère le salarié en CDI comme démissionnaire

Après avoir mis en demeure le salarié de justifier son absence ou de reprendre le travail, l’employeur peut le considérer comme démissionnaire, s’il ne s’est pas plié à la mise en demeure dans le délai fixé.

Mais, le salarié « démissionnaire » reste tenu par son obligation de préavis. En pratique, il est extrêmement peu probable que le salarié reprenne le travail pour effectuer son préavis. Que l’employeur l’en dispense ou non. Durant la durée normale du préavis, le salarié ne peut pas s’inscrire à Pôle Emploi, puisque son contrat de travail n’a pas pris fin.

A l’issue de la période du préavis, le salarié peut s’inscrire à Pôle Emploi, mais ne pourra pas immédiatement obtenir une indemnisation de son chômage. En effet, la perte d’emploi doit être involontaire (ce qui n’est pas le cas de la démission) pour permettre l’indemnisation. La situation est la même pour le droit aux allocations de chômage dans la fonction publique. Pour un fonctionnaire titulaire ou un contractuel, la rupture n’ouvre pas non plus droit au chômage !

Il existe toutefois des démissions dites légitimes permettant l’indemnisation.

Par ailleurs, les anciens salariés peuvent demander les allocations de chômage quatre mois après une démission. Mais, les demandeurs d’emploi doivent impérativement être en recherche active d’emploi. Et, bien sûr, remplir les conditions générales du droit aux allocations à l’exception de la perte involontaire d’emploi.

Lorsque l’employeur rompt le contrat du salarié en CDD pour faute grave

Dès la rupture de son CDD, le salarié peut s’inscrire à Pôle Emploi. Et il pourra bénéficier des allocations, s’il remplit les conditions générales requises.

L’idée selon laquelle une rupture du contrat pour faute grave n’aurait pas droit à l’indemnisation du chômage est largement répandue. Mais elle est fausse ! Normalement il ne devrait pas y avoir de problème, si le salarié satisfait aux conditions générales du droit aux allocations de chômage.

Si toutefois c’était le cas, ce serait surement du fait d’un mauvais remplissage de l’attestation Pôle Emploi par l’employeur. En pratique, l’employeur ne doit pas indiquer « abandon de poste ». Mais, « fin de CDD », ou « rupture CDD pour faute grave ». En effet, la mention de l’abandon de poste pourrait entraîner une confusion dans l’esprit de l’agent de Pôle Emploi. Car pour les CDI, l’abandon de poste est présumé être une démission, qui n’ouvre pas la possibilité d’obtenir les allocations.

Les conditions générales pour bénéficier des allocations de chômage

Pour avoir droit à l’Allocation de Retour à l’Emploi (allocation chômage), le demandeur doit justifier d’une durée suffisante d’emploi comme salarié, accomplies dans une ou plusieurs entreprises relevant du régime d’assurance chômage.

Durée dont le demandeur doit justifier pour avoir droit aux allocations de chômage

La durée d’affiliation minimum est de 130 jours travaillés, ou 910 heures, soit 6 mois au cours des :

  • 24 mois précédant la fin du contrat de travail pour les personnes de moins de 53 ans, à la date de fin de leur contrat de travail,
  • ou durant les 36 mois qui précédent la fin du contrat de travail pour les personnes de 53 ans et plus, à la date de fin de leur contrat de travail.

Attention : La période en abandon de poste pendant laquelle le salarié n’est pas rémunéré n’est pas retenue pour la durée d’affiliation.

Le demandeur doit aussi satisfaire à plusieurs autres conditions

Les autres conditions auxquelles le demandeur doit aussi satisfaire pour l’ouverture du droit à l’indemnisation du chômage sont :

  • être en situation de chômage involontaire, ou prévu par la réglementation. C’est bien le cas d’une personne licenciée pour faute grave, ou pour faute simple, même si l’abandon de poste en est la cause.
  • être apte physiquement à exercer un emploi.
  • ne pas avoir l’âge légal de départ à la retraite, ou ne pas avoir le nombre de trimestres exigé pour percevoir une pension au taux plein.
  • être inscrit comme demandeur d’emploi, ou suivre une action de formation reconnue comme favorisant l’accès à l’emploi.
  • chercher réellement un emploi de manière permanente.
  • résider sur le territoire concerné par le champ d’application du régime de l’assurance chômage (1).

Modalités de l’indemnisation du chômage par Pôle Emploi

Différé et carence

Application d’un différé d’indemnisation du chômage

Un différé d’indemnisation du chômage doit être calculé à partir des indemnités compensatrices de congés payés (ICCP) versées.

Le différé prend en compte l’ensemble des ICCP reçues dans les 182 jours précédant la fin du dernier contrat de travail, par un salarié ayant eu plusieurs fins de contrat.

Par contre, il n’y a pas lieu de calculer de différé d’indemnisation spécifique. Celui-ci ne s’applique, en effet, que s’il existe des indemnités supra-légales de licenciement ou de rupture du CDD. Or, ce ne sera jamais le cas après un abandon de poste.

Application d’un délai d’attente, ou de carence

Un délai d’attente s’applique dans tous les cas d’inscription à Pôle Emploi. Il est fixé à 7 jours à partir de la fin du différé d’indemnisation, ou de la date d’inscription.

Durée d’indemnisation par Pôle Emploi

La durée d’indemnisation du chômage est égale à 75 % de celle d’activité mais aussi de non activité, durant le ou les contrats de travail, complétées des jours intermédiaires entre contrats, durant la période de recherche de l’affiliation de 24 ou 36 mois. Ceci, toutefois, dans la limite d’une durée maximale de :     

  • 18 mois pour les demandeurs d’emploi âgés de moins de 53 ans * ;
  • 22 mois ½ pour les demandeurs d’emploi âgés de 53 à moins de 55 ans * ;
  • et 27 mois pour les demandeurs d’emploi âgés de 55 ans et plus * ;
  • Ou à partir de 62 ans et d’une indemnisation par Pôle Emploi depuis au moins un an, jusqu’à la retraite à taux plein, lorsque les conditions sont réunies (2).

Et d’une durée minimale de 6 mois.

Age à la date de fin de son contrat de travail.

Situation particulière

Les intermittents du spectacle, dockers et pêcheurs et les demandeurs d’emploi dans les territoires ultramarins ont droit à une durée maximum supérieure. Leur durée effective d’indemnisation du chômage est égale à 100 % de celle d’activité et de non activité, durant le ou les contrats et entre eux, durant la période de recherche de l’affiliation de 24 ou 36 mois. Cela, bien sûr, dans la limite d’une durée maximale de :     

  • 24 mois pour les salariés âgés de moins de 53 ans ;
  • 30 mois pour les salariés âgés de 53 à moins de 55 ans ;
  • et 36 mois pour les salariés âgés de 55 ans et plus.

Après la période de versement de l’ARE, l’ex-salarié toujours en recherche d’emploi peut bénéficier d’une allocation de fin de droit ou du RSA, s’il en remplit les conditions.

Calcul de l’Allocation de retour à l’emploi

En premier lieu, il faut calculer le salaire de référence

Fixer le montant de l’Allocation de retour à l’emploi (ARE) nécessite de calculer le salaire journalier de référence (SJR).

Ce SJR est déterminé dans la période de 24 mois précédant le terme du contrat de travail. Ou dans les 36 mois pour les 53 ans et plus. Pour obtenir le SJR, le montant des salaires dans cette période* sera divisé par le nombre de jours calendaires, travaillés et non travaillés, pendant la période de référence. Toutefois, le nombre des jours d’inactivité pris en compte est plafonné à 75 % du nombre de jours travaillés.

* Pour certains jours (maladie..), un salaire fictif est pris en compte.

Conséquence négative suite à un abandon de poste :

Par conséquent, pour un salarié en abandon de poste, plus l’employeur tardera à rompre le contrat, plus le montant des allocations chômage baissera. Or les employeurs ont souvent envie de se venger de l’abandon de poste (bien sûr, sauf s’il est arrangé). Aussi, le sachant, les employeurs pourront être tentés de faire traîner plus souvent et plus longuement la rupture.

Calcul de l’allocation chômage

Le montant brut de l’allocation est de 40,40 % du salaire + 12,47 € par jour, ou 57 % du salaire de référence.

Toutefois, si le résultat est inférieur à 30,42 €, Pôle emploi retiendra ce montant comme allocation. D’autre part, l’allocation ne peut pas dépasser 75 % du salaire journalier de référence.

Passer du brut au net

Pour passer du brut au net, il faut retrancher une cotisation de retraite complémentaire de 3% de l’ancien salaire. Et lorsque l’allocation est d’au moins 53 € par jour, la CSG-CRDS de 6,7 % sur 98,25 % de l’allocation est aussi déduite. Enfin, dans la collectivité d’Alsace et le département de la Moselle, il faut aussi déduire une retenue sociale de 1,50%.

Dégressivité pour certains allocataires

L’allocation des allocataires de Pôle Emploi de moins de 57 ans (à la rupture de leur contrat de travail), dont le salaire brut de référence était de 4 700 €uros, est dégressive.

L’indemnisation baisse de 30 % maximum après chaque période de 6 mois. Mais, cette diminution ne réduira toutefois pas l’allocation en dessous d’environ 2261 €uros nets par mois.

Ceci peut aussi vous intéresser : Les cas de démission légitime pour Pôle Emploi

Autres articles conseillés :

Les risques de l’abandon de poste pour le salarié en CDD

Rejoindre la première page du site Abandon de poste

Article rédigé par Pierre LACREUSE : Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon-Sorbonne. Ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME). Et dernièrement Editeur juridique et relations humaines sur internet.

Ce site gratuit est financé par la publicité, merci de nous soutenir.

(1) Territoire couvert par le régime d’assurance chômage :

Le demandeur d’emploi doit résider sur le territoire couvert par le régime d’assurance chômage : France métropolitaine, DOM hors Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et principauté de Monaco.

Sources :

Circulaires et document explicatif de l’Unedic ; Règlement général relatif à l’assurance chômage ; indemnite.fr ; loi portant mesures d’urgence sur le fonctionnement du marché du travail en vue du plein-emploi du 21 décembre 2022 ; décret no 2023-33 du 26 janvier 2023 relatif au régime d’assurance chômage ; code la sécurité sociale ; code du travail, et jurisprudences de la Cour de cassation.

© Abandon de poste – La marque et le contenu du site abandondeposte.fr sont soumis à la protection de la propriété intellectuelle. Le site Abandon de poste est le 1er site complet d’expertise et conseil autour de l’abandon de poste. Article : Abandon de poste et chômage. Les mots clés sont chômage après l’abandon de poste ; présomption de démission ; rupture du CDD pour abandon de poste ; chômage ; Pôle Emploi ; Allocation de Retour à l’Emploi ; droit aux allocations de chômage ; conditions de l’indemnisation du chômage ; délai de carence ; différé d’indemnisation ; délai d’attente pour le chômage ; indemnisation du chômage ; abandon de poste.

Comments

  • Nicolas dit :

    Bonjour l’équipe d’abandondeposte.fr,
    Tout d’abord merci pour vos réponses ! C’est vraiment gentil. Je vais faire un don pour votre équipe.
    Je fais part de ce qui m’arrive pour les autres lecteurs et à vous pour que vous m’aidiez
    Retour sur ma situation
    18/02/17 : je fais mon abandon de poste et par conséquent, je ne me rends plus sur mon lieu de travail
    28 Mars 17 : je reçois un courrier de licenciement pour faute grave par l’entreprise, après plusieurs lettre me notifiant de revenir et un rendez-vous avec la DRH (3 courriers reçus au cours du mois de Mars).
    2 Avril 17 : Entretien à Pole emploi pour finaliser mon dossier (je m’étais inscrit sur Pole emploi mi-Mars, NE FAITES PAS LA MEME ERREUR, il faut attendre d’être licencié pour s’inscrire sur Pôle emploi).
    Aujourd’hui le 25/04/17, il me manque un papier pour avoir droit au chômage. La notification Pole emploi qui atteste que j’ai travaillé d’Octobre à Février. » l’attestation destinée à Pôle emploi délivrée par votre employeur »
    Savez-vous comment je peux obtenir ce papier ?
    Est-ce parce que je n’ai pas renvoyé mon papier complémentaire santé ?
    Cordialement.
    Merci

    • admin2412 dit :

      Bonjour,
      Votre employeur doit vous remettre l’attestation pour Pôle Emploi, de même que votre certificat de travail et votre solde de tout compte. Je ne sais pas si vous avez eu les deux derniers.
      Quoi qu’il en soit, vous devez appeler votre employeur (ou la DRH selon la dimension de l’entreprise) et demandez s’il vous envoie les documents qui vous manquent. L’employeur peut vous dire de venir les chercher. Dans ce cas allez-y.
      Si votre employeur se refuse à vous les remettre, vous devrez saisir le Conseil de prud’hommes en référé (rapide).
      Bien cordialement.

  • Michael dit :

    Bonjour,
    Je vous explique ma situation ainsi que mes questions, car je ne trouve pas vraiment de réponses pour le moment.
    Je suis actuellement Salarié associé dans une entreprise, en CDI bien sûr et je vais quitter « ma société » par abandon de poste, car l’entreprise n’est plus porteur (magasin de vêtements).
    Je pourrais faire une rupture conventionnelle avec mon associé mais elle serait coûteuse pour l’entreprise, donc je voudrais faire un abandon de poste.
    Ensuite il se pose un autre problème si je peux dire, j’ai créé une entreprise avec un associé il y a de ça 6 mois maintenant mais je me suis mis en gérant minoritaire pour ne pas payer de RSI et ainsi toucher les assedics (d’où l’abandon de poste pour mon ancien travail) ma question est, vu que je suis gérant minoritaire je suppose que j´ai le droit au chomage, mais « je ne cherche pas de travail » vu que je me concentre exclusivement dans ma nouvelle SARL, je ne vais pas prendre de salaire pendant un petit moment sur cette nouvelle boite pour la lancer et ne pas me salarier, est ce que pôle emploi peut me refuser la demande de chômage si je ne cherche pas de boulot ?
    Merci pour vos conseils
    Cordialement.

    • admin2412 dit :

      Bonjour,
      L’inscription à Pôle Emploi et les allocations de chômage sont subordonnées à la recherche d’un emploi. L’inscription est comme « demandeur d’emploi ». Mais, la création d’activité non salariée est considérée comme une recherche d’emploi. Par ailleurs, le cumul d’une gérance antérieure à votre perte d’emploi (dans votre cas par licenciement pour abandon de poste) et du droit au chômage est possible.
      Bien cordialement.

  • 1 2 3 4