La démission, 1e alternative à l’abandon de poste

la démission, alternative à l'abandon de posteLa démission est la 1e alternative à l’abandon de poste. L’abandon de poste n’est pas une démission et les conséquences de l’une et l’autre sont différentes. Les inconvénients de la démission sont-ils si graves, par rapport à l’abandon de poste que le croient les salariés qui choisissent l’abandon de poste ? Simplicité, préavis et délai de libération, possibilité d’obtenir des allocations de chômage : les choses ne sont pas aussi évidentes que certains disent. Une réflexion à avoir quand il est temps.

Une loi de nouvelle réforme de l’assurance chômage a été publiée le 21 décembre 2022. Et, suite à un amendement accepté par le gouvernement l’abandon de poste CDI sera présumé être une démission. De ce fait, un ex-salarié en CDI ne pourra plus recevoir les allocations de chômage. Le Conseil constitutionnel a décidé que les dispositions de la loi sont conformes à la constitution. Mais il faut encore que le gouvernement prenne un décret en Conseil d’Etat. Celui-ci devrait être publié fin mars 2023. Pour en savoir plus.

Démission ou abandon de poste ?

L’abandon de poste n’est pas une démission

L’abandon de poste n’est pas une démission. Mais cela n’est pas une évidence pour tout le monde. En effet, la plupart des salariés qui abandonnent leur poste le font pour éviter les inconvénients de la démission. Et certains pensent simplement, sans trop y réfléchir, que l’abandon de poste est une sorte de démission plus rapide et sans formalités.

De leur côté, une partie des employeurs connaissent mal les contraintes du droit du travail issues de la jurisprudence. C’est pourquoi, ils croient à tort qu’ils peuvent prendre acte de l’abandon de poste et assimiler celui-ci à une démission.

La jurisprudence de la Cour de cassation contribue à faire le droit du travail. Et elle indique que la démission suppose, de la part du salarié, une volonté claire et non équivoque de mettre fin à son contrat de travail. Autrement dit :

  • Le salarié doit remettre sa démission, en toute connaissance de cause
  • et aucun doute ne doit exister quant à son intention réelle, ce qui n’est pas le cas d’une situation d’abandon de poste.

Selon la Cour de cassation, l’employeur qui […] considère comme rompu [le contrat de travail] du fait du salarié doit mettre en œuvre la procédure de licenciement. » Et « à défaut, la rupture s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ».

(Cour de cassation, chambre sociale, mercredi 25 juin 2003, N°: 01-41150).

La Cour de cassation considère même, comme nulle les dispositions contraires de certaines conventions collectives.

Conséquences différentes de la démission et de l’abandon de poste

Un abandon de poste n’a pas les mêmes conséquences qu’une démission.

Le préavis en cas de démission

Sauf dans certaines conditions, le salarié qui démissionne ne peut pas quitter l’entreprise du jour au lendemain : il doit ainsi respecter une période de préavis, fixée par la loi, ou par la convention collective ou dans certains cas par le contrat de travail ou les usages.

Les conséquences vis-à-vis de Pôle Emploi

Le plus souvent la démission ne permet pas de bénéficier des allocations de chômage. Alors qu’un licenciement suite à un abandon de poste ouvre droit au chômage dans les mêmes conditions que pour n’importe quelle perte involontaire d’emploi. Précisons toutefois que c’est le licenciement et non l’abandon de poste qui ouvre cette possibilité…

L’image laissée par le salarié

L’image laissée par le salarié qui abandonne son poste est celle d’un déserteur, qui n’a pas rempli les obligations de son contrat de travail. Aux yeux des employeurs informés, il apparaîtra comme quelqu’un à qui l’on ne peut pas faire confiance. Or l’employeur chez lequel le salarié aura abandonné son poste n’hésitera pas, s’il en a l’occasion, à faire connaître tout le mal qu’il pense de ce salarié. Il y a une seule exception, le cas particulier d’un arrangement amiable. A l’inverse, si un employeur peut regretter la démission d’un salarié, son sentiment ne sera jamais aussi hostile.

Les inconvénients de la démission sont-ils si graves, par rapport à l’abandon de poste ?

La démission est très simple

En théorie, la démission peut être orale. Il est cependant très fortement conseillé de la présenter par lettre recommandée avec avis de réception, ou par remise en main propre contre mention « reçu en main propre le … » écrit par l’employeur (ou son représentant habilité) sur une copie de la lettre de démission. Ceci, afin d’éviter tout litige ultérieur sur sa réalité et sur sa date.

Le salarié n’a pas à indiquer les motifs de sa décision de quitter son employeur, dans sa lettre de démission. En effet, il n’a pas à se justifier. C’est pourquoi, il est possible de formuler la démission de la manière la plus simple possible (1).

Le délai de libération n’est pas toujours plus long pour une démission que pour un abandon de poste

Si en cas d’abandon de poste, le salarié quitte son travail, le délai pour que le contrat de travail soit juridiquement rompu et qu’ainsi le salarié soit véritablement libéré peut être long… voire ne jamais intervenir ! Voir les risques pour le salarié en CDI.

Par ailleurs malgré l’abandon de poste, tant que le contrat de travail n’a pas pris fin, le salarié n’est pas légalement libre de prendre un nouvel emploi ! S’il le fait cependant, son nouvel employeur pourra le lui reprocher s’il vient à l’apprendre et même à mettre fin au contrat de travail venant de prendre effet.

Lorsqu’il y a démission d’un salarié, il est fréquent que l’employeur accepte de raccourcir le préavis. Qu’il soit compréhensif. Ou qu’il pense que le salarié n’aura plus la motivation nécessaire. Parfois, l’employeur dispense même totalement le salarié du préavis.

Ainsi le salarié ayant démissionné pourra, assez souvent, être libéré plus facilement et rapidement que celui ayant abandonné son poste. Les fonctions du salarié peuvent parfois être un frein à sa libération rapide après une démission. Mais, les bonnes relations avec l’employeur conduiront souvent celui-ci à accepter une libération rapide du salarié pour un nouvel emploi. (2)

La démission n’exclut pas toujours d’obtenir les allocations chômage et l’abandon de poste ne le permet pas toujours

Lorsque le salarié abandonne son poste, ce n’est pas forcément parce qu’il a trouvé un nouvel emploi et dans ce cas, il veut naturellement bénéficier du chômage. Cela le conduit souvent à choisir l’abandon de poste plutôt que la démission, mais c’est parfois un mauvais choix !

A la suite de l’abandon de poste, l’employeur peut ne pas licencier le salarié, ou attendre longtemps pour le faire. Or tant qu’il n’est pas licencié, le salarié ne peut pas recevoir d’allocations de chômage. Dans ce cas, l’abandon de poste se retourne contre le salarié.

Concernant la démission, il faut savoir qu’elle permet parfois d’obtenir le versement des allocations de chômage. Certaines démissions reconnues comme légitimes ouvrent ce droit (3). Le cas le plus connu et sans doute le plus fréquent, est celui de la démission pour suivre son conjoint prenant un nouvel emploi, mais il n’est pas le seul !

Par ailleurs, depuis novembre 2019, les démissionnaires qui ont un projet de reconversion professionnelle réel et sérieux peuvent avoir accès à l’allocation chômage, sous conditions. Outre présenter son projet, il faut justifier d’au moins 5 ans d’activité salariée continue (soit 1300 jours) sur les 60 mois précédant la démission (4).

Enfin, le salarié qui a démissionné peut demander le réexamen de sa situation après 121 jours, soit environ 4 mois, de chômage (5).

Ainsi pour obtenir plus vite des allocations de Pôle Emploi, qu’avec la démission, un abandon de poste qui n’est pas suivi d’un licenciement assez rapide peut n’être qu’un avantage minime… quand il n’est pas illusoire.

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Retrouvez les autres alternatives à l’abandon de poste

Pour en savoir plus, lire :

Les risques de l’abandon de poste pour le salarié en CDI

Abandon de poste et chômage

Les cas de démission légitime pour Pôle Emploi

Ou rejoindre la 1ère page du site Abandon de poste

Article rédigé par Pierre LACREUSE : Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon-Sorbonne. Ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME). Et aujourd’hui Editeur juridique et relations humaines sur internet.

Notes :

(1) Simplicité de la démission

Il est possible de rédiger une lettre de démission aussi simplement que cela : indication du destinataire (l’employeur ou le DRH) + date + « M., je vous présente ma démission de mon emploi. » + signature et nom du salarié démissionnaire.

(2) Préavis de démission

Lorsque le salarié obtient de son employeur de ne pas effectuer le préavis, le contrat de travail prendra fin à la date convenue. Le salarié étant demandeur de l’absence de préavis n’aura pas droit à une indemnité compensatrice de préavis. Si l’employeur refuse la suppression du préavis, le salarié devra l’effectuer. A défaut, il risque de devoir verser à l’employeur une indemnité. Celle-ci sera d’un montant égal à la rémunération brute qu’il aurait perçue s’il avait travaillé.

L’employeur peut aussi dispenser le salarié de son préavis, par crainte que la présence du salarié soit plus négative qu’utile. Dans ce cas le salarié ne travaillera pas pendant le préavis, mais il recevra une indemnité compensatrice.

(3) Démissions donnant droit aux allocations de chômage

Il y a des exceptions à la règle selon laquelle seules les personnes involontairement privées d’emploi (licenciement, rupture conventionnelle, pour les salariés en CDI) peuvent prétendre aux allocations de chômage, sous réserve de remplir l’intégralité des conditions générales. En effet, l’accord d’application des règles relatives à l’indemnisation du chômage n° 14 du 14 mai 2014 prévoit que certaines démissions sont légitimes. De ce fait, elles permettent une prise en charge par Pôle emploi.

(4) Possibilité de recevoir des allocations après une démission avec projet de reconversion

Les 5 années exigées pour avoir droit à cette mesure peuvent avoir été réalisées chez un ou plusieurs employeurs. Par contre, les congés sans solde, sabbatique ou périodes de disponibilité ne sont pas pris en compte.

(5) Réexamen possible après 4 mois de chômage

En plus de remplir les conditions générales du droit au chômage (hormis la perte involontaire d’emploi), le demandeur devra dans ce cas, fournir des éléments qui attesteront :

  • de ses recherches actives d’emploi, ainsi que de ses éventuelles reprises d’emploi de courte durée
  • et de ses démarches en vue d’entreprendre des actions de formation.

Le début du versement des allocations sera fixé au 122e jour suivant la fin de contrat de travail au titre de laquelle les allocations lui ont été refusées.

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Comments

  • W Sonia dit :

    Bonjour,
    Mon fils a donné sa démission le 15 avril 2017 à son employeur. Il travaillait à [B…]. C’était sur un coup de tête après avoir subi des violences conjugales dont il nous a informé (ses parents), sans pourtant avoir porté plainte. Il est actuellement sans emploi alors qu’il en cherche un activement. Du fait de la démission il ne peut pas prétendre aux allocations de chômage. Y-a-t’il une autre possibilité pour qu’il puisse en bénéficier, car il peut très bien ne pas trouver de travail pendant 3, 6 mois, voire plus et être en situation de précarité. Actuellement il dort dans un combi véhicule qui lui sert aussi de moyen de déplacement. Comment peut-il être aidé ?
    Je vous remercie d’avance pour votre réponse
    Cordialement.
    Sonia W

    • admin2412 dit :

      Bonjour,
      Votre fils pourrait bénéficier des allocations de Pôle Emploi malgré sa démission, s’il justifiait d’un nouveau domicile éloigné de son lieu de travail et s’il portait plainte auprès du procureur de la République pour les violences conjugales subies.
      Si votre fils recherche très activement un nouvel emploi, quitte à accepter des postes temporaires ne correspondant pas à ses souhaits et en accumulant les preuves d’une recherche très active, il pourra demander un examen par l’Instance Paritaire Régionale de Pôle Emploi (IPR), à partir de 121 jours (4 mois) après la date de fin de son contrat de travail consécutif à sa démission.

      Voir Les cas de démission légitime pour Pôle Emploi

      Votre fils devrait aussi demander à bénéficier du RSA et voir pour cela une assistante sociale du département, afin de connaître ses droits et faire un dossier.

      Cordialement.