Quelle chance aux prud’hommes ?
Question : Quelle chance aux prud’hommes quand le licenciement est tardif suite à un abandon de poste, sans entretien préalable et alors que la rupture aurait pu être faite pendant la période d’essai ?
Pierre
08/06/2017 à 12 h 14 min
Bonjour,
Je suis confronté à un dilemme complexe et je sollicite votre expertise pour avoir un avis ou plutôt de multiples avis extérieurs. Je vous expose les faits, je vous précise que j’ai modifié volontairement les dates de prise de poste et les faits en lien avec mon licenciement.
Mon ex-employeur a eu connaissance de mon absence irrégulière le 01/01/2017. Ce dernier (l’employeur) m’envoie bien un courrier de mise en demeure de reprendre le travail le 07/01/2017, soit 6 jours après constations des faits. Je décide de ne pas y répondre, je reste dans l’attente et ne donne aucune explication à mon employeur. L’employeur et moi-même ne reprenons aucunement contact l’un avec l’autre durant une période largement supérieure à 2 mois (élément nécessaire pour engager une procédure de licenciement pour faute grave). En l’espèce, l’employeur m’envoie le 08/07/2017 une lettre en AR notifiant mon licenciement pour faute grave.
Dans ma situation, il est à noter que l’employeur n’a pas respecté deux éléments pour permettre un licenciement pour faute grave préalablement respectueux du cadre légal. Ce dernier a engagé la procédure bien au-delà du délai de deux mois après constatation de l’absence injustifiée et n’a pas mis en œuvre « l’entretien préalable pouvant aller jusqu’au licenciement » mais m’a licencié directement.
Elément supplémentaire, j’ai débuté mon contrat de travail le 01/11/2016, j’avais été engagé en qualité de cadre. Au moment des faits d’absence injustifiée j’étais en période d’essai pour une durée de 4 mois. L’employeur aurait-il dû faire le choix de mettre fin au contrat en stipulant « période d’essai non concluante » plutôt que de faire le choix de procéder à un licenciement au-delà d’une période de 6 mois ?
Apres cette mise en perspective de manière factuelle de cette situation vécue récemment, pensez-vous que j’ai des chances d’avoir gain de cause au sein des instances prud’homales si je décide d’engager une action à l’encontre de cet employeur ?
SVP : je viens sur ce forum afin d’obtenir un avis objectif exsangue de jugement de valeur donc je vous remercie par avance pour la transmission de vos informations éclairées.
Réponse pour que vous puissiez apprécier quelle chance vous avez aux prud’hommes
Admin
09/06/2017 à 15 h 00
Bonjour,
Je retiens trois questions auxquelles je vais vous apporter des réponses et qui vous permettront d’apprécier quelle chance vous avez aux prud’hommes :
- Quand un licenciement suite à un abandon de poste peut-il intervenir ?
- Rupture pendant la période d’essai ou licenciement ultérieur ?
- Quelle conséquence a l’absence d’entretien préalable au licenciement ?
Quand un licenciement suite à un abandon de poste peut-il intervenir ?
Je ne comprends pas pourquoi vous dites (je vous cite) « période largement supérieure à 2 mois (élément nécessaire pour engager une procédure de licenciement pour faute grave) ». Une période d’attente de deux mois pour procéder au licenciement n’est nullement nécessaire après un abandon de poste. C’est même le contraire qui est vrai. Une procédure de licenciement pour faute doit être engagée au plus tard dans les deux mois après la connaissance par l’employeur du fait fautif invoqué.
L’abandon de poste étant un fait instantané, ne peut donner lieu à des poursuites disciplinaires au-delà du délai de deux mois. Cependant, si l’employeur invoque des fautes commises dans la période de moins de deux mois précédant la procédure de licenciement : absence injustifiée qui se prolonge, réitération par le salarié de son refus de reprendre son travail (ou non réponse par le salarié) après une mise en demeure, le licenciement est possible et la faute grave peut être invoquée.
Pour en savoir plus, je vous invite à prendre connaissance des jurisprudences sur cette importante question : quand licencier pour abandon de poste est-il possible ?
N’ayant pas connaissance de votre lettre de licenciement, je vous laisse faire le rapprochement entre les éléments de ma réponse et la ou les motivations par l’employeur de votre licenciement figurant sur votre lettre de licenciement. Vous en déduirez si vous avez des chances ou non devant les prud’hommes.
Rupture pendant la période d’essai ou licenciement ultérieur ?
Votre employeur aurait naturellement pu mettre fin à votre contrat de travail pendant la période d’essai. Cela aurait été plus simple pour lui que de vous licencier ultérieurement et il n’aurait pris aucun risque aux prud’hommes. Ceci étant, je ne vois pas en quoi vous pourriez le lui reprocher, ou en quoi ce serait un argument juridique contre lui.
Quelle conséquence a l’absence d’entretien préalable au licenciement ?
L’entretien préalable au licenciement est une phase obligatoire d’une procédure de licenciement (la seule exception à cette obligation est celle d’un licenciement pour motif économique visant plus de 10 personnes).
L’employeur est tenu de convoquer le salarié à cet entretien pour lui exposer les motifs du licenciement envisagé et entendre ses explications afin de pouvoir prendre sa décision définitive. Mais, si l’employeur a organisé l’entretien et que le salarié ne s’y présente pas, cela n’a pas d’incidence.
L’absence d’entretien préalable avant la notification du licenciement (même si l’employeur n’a pas rempli son obligation) ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse. Si l’employeur n’a pas convoqué le salarié, cela constitue une irrégularité de procédure qui est sanctionnée par des dommages et intérêts pour le préjudice subi. Sur ce point vous aurez satisfaction, si vous saisissez les prud’hommes, mais quelle sera l’indemnisation ? Sans doute sera-t-elle très faible en raison de votre ancienneté et du fait que vous avez travaillé peu de temps avant de faire votre abandon de poste. De plus, puisque vous avez abandonné votre poste, il ne semble même pas y avoir de préjudice pour vous ; au contraire le licenciement peut vous ouvrir une possibilité de droit au chômage, si vous remplissez les conditions générales.
Les jugements des prud’hommes sont souvent aléatoires
Le motif de l’abandon de poste et contenu de la lettre de licenciement et tout élément de l’affaire vous concernant ont une importance. Par ailleurs, la pertinence et l’habileté des avocats ou défenseurs syndicaux peut conduire à un jugement différent. Les conseillers prud’homaux, qui sont des juges non professionnels, peuvent aussi avoir des visions qui ne sont pas toujours semblables.
Bref les jugements sont souvent aléatoires et génèrent beaucoup de contestation. Si la loi Macron du 6 août 2015 qui a réformé les prud’hommes devrait améliorer la qualité et la rapidité des jugements des conseils de prud’hommes, son efficacité ne se verra que sur le moyen et long terme.
Bien cordialement.
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